Le Tourbillon – Journal officiel mensuel de la Ville de La Chaux-de-Fonds

Journal officiel mensuel
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Regards croisés : histoires et bavardages

Regards croisés : histoires
et bavardages

Regards Croisés est de retour avec ses invité·e·s et ses podcasts. Nous retrouvons Lou, Mahé et Liliane qui ouvrent cette nouvelle année 2023. La première idée était d’aborder le thème de la Saint-Valentin, de graviter autour des relations amoureuses et des histoires qui en découlent… Mais ces trois rencontres en ont décidé autrement, l’amour n’étant pas toujours sujet à animer la conversation, ni au centre de l’intérêt de toutes et tous. Et c’est tant mieux ainsi.

Ce Regards Croisés annonce donc un retour en douceur, sans thème particulier, des instants où l’on se surprend à papoter de choses et d’autres.

À l'époque de ma grand-mère, lorsqu'une fille plaisait à un garçon, il chantait pour la séduire. Si la femme chantait en retour, c'est qu'il lui plaisait également. Ensuite, l'homme lui envoyait une lettre avec un joli panier de fleurs et la fille devait attendre la décision de son père.

Cette rubrique existe également afin de donner la parole aux
lecteurs·rices, c’est pourquoi nous invitons toutes celles et tous ceux qui souhaitent y participer à nous écrire à regards@letourbillon.ch.


Indiquez votre nom, un numéro de téléphone et précisez si vous vous inscrivez pour la partie « senior » ou « junior ». Pour des raisons pratiques, 4 personnes maximum peuvent s’inscrire à la fois (en couple, avec un/une ami·e, plusieurs enfants, etc.).

Liliane était infirmière de profession, des horaires et des conditions de travail difficiles, d’autant plus lorsqu’on est maman. Malgré tout, elle aimait beaucoup son métier. Heureusement, il y avait la garderie pour l’aider et son mari préparait les repas à la maison.

Liliane a également beaucoup voyagé : Angleterre, Australie, Canada… Elle a aussi vadrouillé en Suisse, avec sa fille notamment, qu’elle accompagnait à ses compétitions de patinage artistique.

Voilà 15 ans qu’elle se rend au foyer de jour du home « Le Temps Présent ». Elle s’y plaît énormément, elle me parle avec une grande affection de l’esprit de famille qui y règne, des animateurs·trices qui sont aux petits soins et à l’écoute. Toutes les activités proposées la ravissent : la cuisine, les sorties et les promenades, les films, les vacances… » Il y a vraiment une bonne ambiance ici, on ne peut pas s’ennuyer ! » conclut-elle avec un grand sourire.

 

À l'école, nous avons nos « moments de projets personnels », nous pouvons décider nous-mêmes du thème. En ce moment, je fabrique un distributeur de bonbons en bois et ma sœur a choisi de faire un exposé sur l'hippocampe.
- Lou

Lou, 10 ans (à gauche) et Mahé, 8 ans, m’accueillent dans un joli appartement ensoleillé. Ici, le salon se transforme en terrain de jeux, ce qui n’est pas pour déplaire aux deux sœurs pleines d’énergie : cordes et cerceaux suspendus aux poutres offrent aux fillettes l’endroit idéal où s’entraîner avant leurs cours à l’école de cirque « Circo Bello ».

Elles suivent leur scolarité à la « Scola Bumbaïa », une école qui s’inspire de diverses pédagogies actives et qui propose un environnement respectueux, riche et stimulant. Ateliers variés, projets individuels ou collectifs, exploration et observation de la nature, jardinage, recyclage… Toutes les activités proposées invitent les enfants à apprendre tout en développant leur plein potentiel et leur autonomie grâce à une structure adaptée à leurs besoins.

Textes, photos & audio : Sophie Amey

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Regards croisés : les traditions hivernales des fêtes de fin d’année

Regards croisés : lES TRADITIONS DES FÊTES DE FIN D'ANNéE

Mes parents étaient catholiques, à Noël nous allions à la messe de minuit. Quand on rentrait, ma maman nous préparait de la tresse, du café et de l’Ovomaltine avant d’aller au lit.

Les fêtes de décembre arrivant à grands pas, ce dernier “ Regards Croisés ” de l’année nous invite à plonger dans l’ambiance de cette belle période. Le prochain numéro du Tourbillon proposera une édition spéciale et consacrera sa double page centrale à des photographies de “ rétrospective de La Chaux-de-Fonds 2022 ”.

Pour découvrir comment se passaient ces fêtes il y a 80 ans, j’ai rencontré Jacqueline Vuilleumier, qui conte l’histoire de sa vie : “ J’ai eu 90 ans cette année, je suis née en 1932, j’ai vécu la guerre quand j’avais un peu plus de 10 ans ”. 90 ans… Je suis stupéfaite par l’énergie et la mémoire impressionnante de Jacqueline. Elle se rend au foyer de jour du home Le Temps Présent tous les mardis, et ce, depuis environ trois ans.

Un programme qui lui plaît : rendez-vous à 10h pour le café, s’ensuit d’une matinée de jeux, un bon repas à midi et rebelote, on joue jusqu’à 16h puis nous sommes reconduits·es à la maison.

L’âme de ses souvenirs n’a pas pris une seule ride, ses yeux expriment chacune de ses émotions qui ravivent le passé.

Elle se rappelle les ambiances de son enfance : la “ pétoche ” qu’elle avait lorsque le père Noël venait à la maison, et aussi sa maman qui préparait un rôti avec des “ schtok ”, une expression qui désigne la purée de patate. “ À Nouvel An, la soirée se passait en famille, à faire des jeux, on se souhaitait la bonne année et nous allions au lit. Dans le temps ce n’était pas une grosse fête, les gens n’avaient pas d’argent, chacun restait chez soi. “

Une fois, ma cousine est venue dormir, on n’avait pas le droit, mais on s’est levées tout doucement la nuit. On est retourné au lit, car si on ne dort pas ou si on fait semblant de dormir, le père Noël ne vient pas  ! – Clémentine

Parler Noël et fêtes de fin d’année plus de vingt jours avant la date, c’est visiblement trop tôt pour les trois “petits monstres” de la classe 3FR112 que j’interroge au collège Numa-Droz.

Willow, Clémentine et Satinka, par ordre d’apparition sur la photo, ne sont pas encore dans l’ambiance, mais ils racontent tout de même leurs histoires au sujet des calendriers de l’Avent et des cadeaux que préparent les parents. Cette tradition datant du 19 e siècle et d’origine germanique, permet aux enfants de patienter jusqu’à Noël. Une image religieuse était offerte chaque matin durant les
25 premiers jours de décembre. Aujourd’hui la tradition se perpétue, mais les enfants trouvent généralement des surprises gourmandes ou ludiques dans leur calendrier.

Le Saint-Nicolas est toujours aussi populaire, il dépose des chocolats et des cacahuètes dans les pantoufles en se rendant dans les écoles. Mais bien entendu, ces trois rigolos de la classe 3FR112 ont été sages, ils ne risquent pas la visite du père Fouettard… Ils savent même déjà ce qu’ils demanderont au père Noël cette année.

Le père Noël tiendrait ses origines du Saint-Nicolas, son histoire s’est ensuite mêlée avec diverses traditions et légendes. Certains disent qu’il est relié à la mythologie nordique, d’autres pensent qu’il vient de Sibérie et de rituels chamaniques… Qui saurait dire exactement, peut-être vit-il au Pôle Nord, comme le racontent certains parents. Entouré de lutins et de ses rennes, appliqué à lire les listes de souhaits envoyées par des millions d’enfants… Après tout, c’est ça, la magie des fêtes.

Textes et audio : Sophie Amey
Photos : Sophie Amey et Nolan Crelier

 

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Regards croisés : farces ou friandises ?

Regards croisés : farces ou friandises ?

MON FRÈRE AVAIT DIT QU'EN ITALIE ILS NE DISENT PAS UN BONBON OU UN SORT MAIS UNE PIZZA OU UN SORT ET ILS DONNENT UNE PIZZA GÉANTE À CHACUN DES ENFANTS.
– ÉLOÏSE

Qui dit fin octobre dit Halloween. Cette fête, qui existe depuis près de 3000 ans, est originaire des îles Anglo-Celtes. Le 31 octobre, veille de la Toussaint, était le dernier jour du calendrier celtique. Ce Nouvel An s’appelait “fête de Samain”, nom du dieu de la mort. La légende raconte que durant cette dernière nuit de l’année, les défunts venaient rendre visite aux vivants. Les Celtes portaient alors des déguisements terrifiants, espérant effrayer et faire fuir les esprits.
C’est au 19e siècle que les immigrés irlandais emportèrent cette tradition aux États-Unis avec eux.

Depuis plusieurs années, Halloween s’est également fait une petite place en Suisse… À la plus grande joie des enfants qui, plongés dans la peau de leurs monstres et créatures légendaires préférés, partent à la chasse aux bonbons.

C’est au collège Numa-Droz que quatre frimousses aux larges sourires m’attendent : Éloïse, Ilène, Wëndy et Selim (de gauche à droite) sont enthousiastes de parler de cette fête et d’histoires qui font peur. Ils en connaissent un rayon sur le sujet : comment faire du faux sang avec de la confiture ou du jus de tomate, les étranges bestioles qui sortent tout droit de leur imagination et les films d’horreur qu’ils ont vus, mais “c’est juste des marionnettes et des déguisements, tous les parents disent que ça n’existe pas alors c’est que c’est vrai !”, affirment-ils.

Ce qui est vrai en revanche, c’est que ces quatre phénomènes âgés de 6 ou 7 ans ne manquent pas de bagout et de fantaisie !

POUR MOI, HALLOWEEN C'EST UNE FÊTE OÙ LES ENFANTS VONT CHERCHER DES BONBONS AUX PORTES, AUTREMENT JE N'Y TROUVE PAS TELLEMENT DE SENS, DANS LE TEMPS ÇA N'EXISTAIT PAS. ÉTANT CATHOLIQUES, NOUS FÊTIONS LA TOUSSAINT EN ALLANT SUR LES TOMBES DE NOS MORTS.

Halloween ayant débarqué en Europe dans les années 1990, cette fête reste peu, voire pas du tout, connue par une grande partie des générations plus anciennes. Une manifestation jugée principalement commerciale pour la plupart de la population d’aujourd’hui, elle se célèbre également en se recueillant sur la tombe de “ses morts” à la Toussaint, le 1er novembre.

C’est ce qu’explique Isabelle Salzmann, qui m’accueille dans sa belle chambre du home Les Arbres. Les murs sont tapissés de photos de famille et de son chat, des mandalas qu’elle aime colorier et des bricolages offerts par ses petits-enfants. Deux grandes fenêtres s’ouvrent sur un balcon baigné d’une lumière automnale.

D’une voix douce, cette dame se confie et retrace son histoire, ses récits m’impressionnent. Une enfant qui a grandi dans un milieu pauvre, dans une ferme isolée, faisant face aux difficultés qu’impose la vie…

Puis à 20 ans, elle s’achète un billet de train, et c’est avec 2 francs en poche qu’elle partit à Morges, où elle vécut durant 10 ans.

La vie ne l’a pas toujours épargnée, mais je sens qu’elle garde en elle les belles années, vécues et à venir, comme un cadeau. “J’ai beaucoup travaillé chez mes parents à la campagne. C’était une vie très saine, les aliments n’étaient pas traités, je n’étais jamais malade, la première fois que je suis allée chez le médecin, j’avais 20 ans. C’est sûrement grâce à tout ça que j’ai toujours eu une très bonne santé, encore maintenant. Je touche du bois, pourvu que ça dure !” me dit-elle en se touchant la tête.

Quelle grande dame j’ai eu la chance de rencontrer ce jour-là, de celles qu’on écouterait pendant des heures sans se lasser !

Textes : Sophie Amey
Photos et audio : Nolan Crelier

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Naya, Carolina et Marie-Thérèse nous parlent de l’automne, entre autres…

Naya, Carolina et Marie-Thérèse nous parlent de l'automne, entre autres...

Photo : Aline Henchoz

Carolina (à gauche) et Naya (à droite) nous chantent une chanson adaptée à la saison : "...Elle m'a tendu des pommes, j'ai cru tomber dedans, avec une phrase du genre : "les fruits c'est trop sympa !" tu parles y'a pas la moindre pépite de chocolat, vive les cookies, y'a rien de mieux ici-bas..."

Qu’aimez-vous faire durant l’automne ?” ai-je demandé pour amorcer la discussion. Silence radio… Les deux fillettes de 9 ans sont assises sur le canapé face à moi, les yeux écarquillés. La question ne les inspire que modérément visiblement. Ou est-ce un peu de timidité face au micro qui les enregistre ? Très certainement, mais une fois lancées, les deux acolytes racontent leurs péripéties qui n’existent que dans l’enfance.

Le fil de notre conversation est parsemé de sujets en tout genre : Halloween, les jeux, l’orthophonie, la boucle d’oreille perdue à la plage le week-end dernier…

Arrive alors le moment d’avouer quelques bêtises qu’elles ont pu faire : “j’ai mis du sucre dans le lit de mes parents une fois”

confesse Naya, ou “en octobre je vole souvent des bonbons à mes amis” confie Carolina. Des révélations faites avec une pointe de malice dans leur regard. Des gentilles bêtises, leur bienveillance envers autrui est touchante.

La discussion vagabonde d’une fillette à l’autre, telle une balle qu’elle se renvoie, à ma plus grande joie. Je n’existe plus, plus personne n’existe d’ailleurs, elles en oublient même le micro. Il ne reste plus qu’elles et leurs histoires. Petit bout de planète Terre où se forme une bulle, grâce à leur imagination et à leur belle complicité.

Elles n’en perdent pas le nord pour autant, lorsque, au moment de partir elles me lancent “alors, elle est prévue quand notre prochaine interview ?”.

En automne on allait au bois avec la charrette, les gamins mettaient le bois en panier et on le montait au galetas et puis On recevait 20 cts ou 50cts et c'était quelque chose, ça avait une grande valeur !

Photo : Aline Henchoz

Derrière ses lunettes, les yeux tendres de Marie-Thérèse révèlent un caractère qui semble bien trempé. Un timide rayon de soleil matinal vient nous tenir compagnie dans la salle d’animation du home Le Temps Présent.

Au fil de la conversation, les histoires de ma conteuse prennent vie dans la pièce : je vois l’automne s’installer, les champignons dans le mouchoir en tissu jaune de son père, la charrette pleine de bois qu’on tire à travers la forêt pour chauffer la maison…

Soucieuse du petit détail, Marie-Thérèse farfouille dans ses souvenirs pour y dénicher chaque trésor du passé. Je ne suis pas surprise de percevoir de nombreuses similitudes entre nos générations. Le tricot, qui faisait jadis pleinement partie de la vie et remplaçait à merveille les écrans, a fait son grand retour dans notre quotidien actuel. “Ici, la plupart des résident·e·s portent des chaussettes tricotées à la main”. On plaisante sur la laine qui gratte et les “culottes-bas”, comme on appelait les collants autrefois.

Les expressions et mots du passé entrent dans la danse de ses anecdotes : les pommes Beutchin, les cœurs vaillants, les beignets au genou appelés plus communément les merveilles, et ma préférée, qui renferme un charme indéniable : “aller à la maraude” qui signifie voler des aliments, en particulier des fruits et légumes, dans les jardins, les champs et les fermes.

Nous parlons encore un peu gastronomie : rôti, kougelhopf, cuisse-dame, toetché, tout y passe jusqu’à “la goutte” de kirsch ou de damassine qui, à l’époque, se vendait au décilitre.

Nous arrivons à la fin de la rétrospective de la vie de Marie-Thérèse, même si, j’en suis certaine, il nous faudrait des semaines pour épuiser le réservoir de ses souvenirs.

Textes : Sophie Amey
Photos et audio : Nolan Crelier