Le Tourbillon – Journal officiel mensuel de la Ville de La Chaux-de-Fonds

Journal officiel mensuel
de la Ville de La Chaux-de-Fonds

Naya, Carolina et Marie-Thérèse nous parlent de l'automne, entre autres...

Photo : Aline Henchoz

Carolina (à gauche) et Naya (à droite) nous chantent une chanson adaptée à la saison : "...Elle m'a tendu des pommes, j'ai cru tomber dedans, avec une phrase du genre : "les fruits c'est trop sympa !" tu parles y'a pas la moindre pépite de chocolat, vive les cookies, y'a rien de mieux ici-bas..."

Qu’aimez-vous faire durant l’automne ?” ai-je demandé pour amorcer la discussion. Silence radio… Les deux fillettes de 9 ans sont assises sur le canapé face à moi, les yeux écarquillés. La question ne les inspire que modérément visiblement. Ou est-ce un peu de timidité face au micro qui les enregistre ? Très certainement, mais une fois lancées, les deux acolytes racontent leurs péripéties qui n’existent que dans l’enfance.

Le fil de notre conversation est parsemé de sujets en tout genre : Halloween, les jeux, l’orthophonie, la boucle d’oreille perdue à la plage le week-end dernier…

Arrive alors le moment d’avouer quelques bêtises qu’elles ont pu faire : “j’ai mis du sucre dans le lit de mes parents une fois”

confesse Naya, ou “en octobre je vole souvent des bonbons à mes amis” confie Carolina. Des révélations faites avec une pointe de malice dans leur regard. Des gentilles bêtises, leur bienveillance envers autrui est touchante.

La discussion vagabonde d’une fillette à l’autre, telle une balle qu’elle se renvoie, à ma plus grande joie. Je n’existe plus, plus personne n’existe d’ailleurs, elles en oublient même le micro. Il ne reste plus qu’elles et leurs histoires. Petit bout de planète Terre où se forme une bulle, grâce à leur imagination et à leur belle complicité.

Elles n’en perdent pas le nord pour autant, lorsque, au moment de partir elles me lancent “alors, elle est prévue quand notre prochaine interview ?”.

En automne on allait au bois avec la charrette, les gamins mettaient le bois en panier et on le montait au galetas et puis On recevait 20 cts ou 50cts et c'était quelque chose, ça avait une grande valeur !

Photo : Aline Henchoz

Derrière ses lunettes, les yeux tendres de Marie-Thérèse révèlent un caractère qui semble bien trempé. Un timide rayon de soleil matinal vient nous tenir compagnie dans la salle d’animation du home Le Temps Présent.

Au fil de la conversation, les histoires de ma conteuse prennent vie dans la pièce : je vois l’automne s’installer, les champignons dans le mouchoir en tissu jaune de son père, la charrette pleine de bois qu’on tire à travers la forêt pour chauffer la maison…

Soucieuse du petit détail, Marie-Thérèse farfouille dans ses souvenirs pour y dénicher chaque trésor du passé. Je ne suis pas surprise de percevoir de nombreuses similitudes entre nos générations. Le tricot, qui faisait jadis pleinement partie de la vie et remplaçait à merveille les écrans, a fait son grand retour dans notre quotidien actuel. “Ici, la plupart des résident·e·s portent des chaussettes tricotées à la main”. On plaisante sur la laine qui gratte et les “culottes-bas”, comme on appelait les collants autrefois.

Les expressions et mots du passé entrent dans la danse de ses anecdotes : les pommes Beutchin, les cœurs vaillants, les beignets au genou appelés plus communément les merveilles, et ma préférée, qui renferme un charme indéniable : “aller à la maraude” qui signifie voler des aliments, en particulier des fruits et légumes, dans les jardins, les champs et les fermes.

Nous parlons encore un peu gastronomie : rôti, kougelhopf, cuisse-dame, toetché, tout y passe jusqu’à “la goutte” de kirsch ou de damassine qui, à l’époque, se vendait au décilitre.

Nous arrivons à la fin de la rétrospective de la vie de Marie-Thérèse, même si, j’en suis certaine, il nous faudrait des semaines pour épuiser le réservoir de ses souvenirs.

Textes : Sophie Amey
Photos et audio : Nolan Crelier