Le Tourbillon – Journal officiel mensuel de la Ville de La Chaux-de-Fonds
MUZOO, qui a totalement ouvert ses portes le 17 décembre 2022, est né de la fusion du Bois du Petit-Château et du Musée d’histoire naturelle (MHNC) qui s’est installé dans le bâtiment de l’Ancien Stand. Le Dossier du mois de mai vous emmène à la rencontre de cet écrin de nature et de ses habitants, mais aussi des personnes qui, chaque jour, s’investissent sans compter et sans qui ce lieu magique ne vivrait pas. Un endroit ludique qui réunit découvertes, jeux et partages. Nicolas Margraf, conservateur et responsable du secteur muséal et Christelle Jaeggi, soigneuse animalière, ont répondu à nos questions :
1) Pouvez-vous résumer l’histoire de MUZOO, de la création du Bois du Petit-Château et du Musée d’histoire naturelle, jusqu’à leur fusion en 2022 ?
Nicolas: Le musée d’histoire naturelle a été fondé en 1880 dans une salle du Vieux-Collège (rue du Collège 6), sur la base d’une collection scolaire initiée par Célestin Nicolet (pharmacien, botaniste et géologue). Après plusieurs déménagements, le musée pose ses valises à l’Hôtel des Postes où il reste jusqu’en 2022. L’année dernière, il s’installe à l’Ancien Stand et fusionne avec le zoo sous l’appellation “MUZOO”.
Le zoo quant à lui est né en 1891. La “société d’embellissement” fait don à la commune du parc public “le Bois du Petit-Château” qui deviendra progressivement un parc animalier. C’est en 1974 que ce parc animalier se transforme en parc zoologique avec l’introduction de nombreuses espèces.
Par la suite, le Vivarium est accueilli sur le même site avec la construction de cinq pavillons. En 1998, le Zoo, le Vivarium et le MHNC se regroupent au sein des “Institutions zoologiques”. Depuis 2001 l’idée de déplacer le MHNC à l’Ancien Stand est évoquée, mais aucun projet n’aboutit, le musée ferme ses portes au public en 2014. C’est en 2017 que le projet appelé à l’époque “IZoo18” commence à germer. Il est accepté par le Conseil général en 2018 et est inauguré en 2022, sous le nom “MUZOO”.
2) Parlez-nous des collections exposées au musée, quelles sont leurs histoires ?
Nicolas : Les collections d’un musée s’étoffent au fil du temps. Les collections de MUZOO ont été largement enrichies par un certain Dr Albert Monard, conservateur du musée dans les années 30. Plusieurs animaux africains sont rapportés de ses expéditions en Afrique (particulièrement en Angola) pour rejoindre les collections. Celles-ci s’enrichissent également grâce aux échanges et aux dons. J’aime à dire que la collection d’un musée est comme un iceberg : le public ne voit qu’une petite partie de ce qui existe réellement. Les collections de MUZOO comptent près de 100’000 objets, qui vont du fossile à l’éléphant, mais seuls 275 animaux sont visibles par le public, une grande proportion n’est donc pas exposée.
Un certain nombre de spécimens en collection ont une importance internationale, par exemple les “spécimens type”, toutes les espèces ont en un. Lorsqu’un scientifique décrit une nouvelle espèce, il sélectionne un individu (parfois plusieurs), il le met en collection et base sa description de l’espèce sur ce spécimen. Cet individu doit être conservé dans un musée et devient une référence. MUZOO est dépositaire d’un certain nombre de types d’espèces d’insectes, quelques mammifères et certains oiseaux. Les chercheurs viennent parfois de loin pour les étudier.
Comme je l’ai dit précédemment, les collections s’agrandissent aussi à la faveur de dons, mais on ne peut pas tout accepter. Le musée suit une politique d’acquisition. Pour qu’un spécimen entre en collection, il est important qu’il soit en règle, détenteur de papiers, mais aussi, pour asseoir sa valeur scientifique, il est nécessaire de savoir d’où provient le spécimen, où a été faite la capture et quand. Grâce à ces informations, les chercheurs peuvent retracer l’histoire d’un spécimen, mais aussi l’histoire d’une espèce dans le temps et dans l’espace afin d’étudier, par exemple, la variation des aires de répartition… un thème particulièrement intéressant et important, à une époque des grands bouleversements climatiques qui modifient la distribution des espèces sur la planète.
3) Pouvez-vous nous décrire le déroulement d’une journée à MUZOO ?
Nicolas : Au musée, la journée de travail commence principalement en coulisse : entretien de l’exposition, préparation et accueil d’activités tel que les anniversaires, les animations et ateliers divers, les visites guidées, et parfois les afterworks qui ont lieu en soirée, tous les derniers jeudis du mois dans un musée différent. Nous nous occupons également de la boutique qui réunit des articles écoresponsables sélectionnés avec soin et de la mise en place de la cafétéria avant l’ouverture à 10h. Elle propose des repas produits localement, frais, et livrés chaque jour. On peut aussi y boire un verre avec de la bière locale à la pression, ou du vin de la ville. Nous nous réjouissons de l’arrivée des beaux jours pour pouvoir accueillir les visiteurs·euses sur la magnifique terrasse de MUZOO.
L’une des tâches importantes du musée est le soin aux collections, c’est le travail de la conservatrice-restauratrice. Que ce soit les animaux naturalisés exposés ou ceux qui sont dans les dépôts, elle s’occupe de fournir les conditions optimales à leur conservation, elle les bichonne et les répare au besoin. Elle doit notamment dépoussiérer et prendre soin des animaux exposés avant l’arrivée du public. Elle est chargée également de surveiller l’état des animaux empaillés et de prévenir toute infestation, car ils sont susceptibles d’être attaqués par des ravageurs tels que des mites, par exemple.
Christelle : Au zoo, la première chose à faire en arrivant, c’est de vérifier que tous les animaux vont bien. Nous ouvrons à ceux que nous rentrons à l’intérieur le soir (poules, canards, chèvres), nous les nourrissons et nous nettoyons les enclos. En fin de journée nous préparons la nourriture pour le soir et pour le lendemain, et nous rentrons les animaux. En plus de cela s’ajoutent les petits imprévus et les surprises telles que les naissances, les arrivées, etc. Les journées et le temps passent très vite.
4) Quelles professions trouve-t-on à MUZOO, autant dans le secteur animalier et que muséal ?
Nicolas : Au total, nous sommes une quarantaine à travailler à MUZOO, pour l’équivalent de 15 postes à plein temps. À la tête de MUZOO, il y a le directeur, Xavier Huther. Puis l’équipe est séparée en deux secteurs: le secteur zoologique avec Yasmine Ponnampalam comme responsable et le secteur muséal dont j’ai la responsabilité.
Au musée nous ne sommes pas très nombreux, il y a l’équipe scientifique et l’équipe d’accueil. Puis les services transversaux, qui comprennent la médiatrice et l’assistante administrative.
Christelle : Du côté du zoo, il y a plusieurs soigneurs·euses, un agent technique, deux apprenti·e·s et des civilistes qui nous aident.
N’oublions pas que le zoo est ouvert 365 jours par an, car il faut bien sûr s’occuper des animaux tous les jours. Le zoo héberge aussi la seule station de soin du canton qui compte deux infirmeries où les animaux sauvages blessés sont amenés par la population. Nous recevons près de 800 animaux par an que nous essayons, dans la mesure du possible, de soigner et de relâcher. Cela demande beaucoup de travail et d’investissement, que ce soit le week-end, la nuit, etc…ce sont des métiers passion. Heureusement, des bénévoles offrent de leur temps pour aider à la station de soin.
Nous n’avons pas de vétérinaire à l’interne, lorsque c’est nécessaire, nous amenons les animaux chez un spécialiste externe. Nous accueillons beaucoup d’oisillons, de jeunes orphelins, les accidentés de la route, des cas d’empoisonnements, les hérissons blessés par des tondeuses à gazon… une vraie catastrophe!
5) Comment fait-on si l’on souhaite se former ou travailler à MUZOO ?
Nicolas : Au musée pour le moment, nous ne formons pas d’apprenti·e·s, mais deux civilistes font actuellement leur service civil ici. Pour intégrer l’équipe scientifique, il est nécessaire d’avoir fait des études dans les domaines de la biologie, des sciences naturelles ou environnementales. En ce qui concerne la conservation-restauration, un excellent cursus est proposé dans ce domaine à la HE-Arc. Pour ma part, j’ai étudié la biologie avec une formation complémentaire en muséologie.
Christelle : Au zoo, il est possible d’effectuer des stages, une demande et une lettre de motivation doit être envoyée à MUZOO. Nous formons également un/une apprenti·e tous les deux ans. Actuellement, nous avons deux apprentis, mais c’est un cas spécial.
Pour devenir soigneur·euse animalier, il faut compter 3 ans d’apprentissage à l’EPSIC à Lausanne, ou 2 ans si la personne détient déjà un CFC. Durant la formation et les stages interentreprises, nous sommes confrontés à toute sorte d’animaux que nous étudions. À MUZOO également, nous sommes amenés à travailler dans tous les secteurs: rapaces, mammifères, au vivarium… Ensuite certaines affinités se créent avec les animaux, chacun·e à ses préférences et est à l’aise avec telle ou telle espèce.
6) Quelles institutions réglementent les normes et les lois sur la détention d’animaux ?
Christelle : C’est l’OPAn, “l’ordonnance sur la protection des animaux”. C’est elle qui détermine les normes concernant la superficie et le nombre d’animaux autorisés par m2. Bien entendu à MUZOO le but est d’avoir ce qui se fait de mieux et d’offrir le plus d’espace possible aux animaux. Le SCAV (Service de la consommation et des affaires vétérinaires) intervient également, il contrôle, accepte ou refuse les demandes spéciales. Par exemple, nous avons eu une chevêche (petite chouette) qui avait une patte abimée. En général, nous n’avons pas le droit de détenir un animal sauvage, mais comme elle n’aurait pas pu chasser dans la nature, nous avons obtenu l’autorisation du service de la faune du Jura de la garder.
Nous réalisons également des échanges entre zoos afin d’accueillir de nouveaux animaux et pour éviter que les individus d’une même famille ne se reproduisent entre eux. Quand il y a une naissance, nous devons l’ajouter dans un registre dans les 3 jours qui suivent, en informant que telle espèce est née, les informations sur le père et la mère. Certains animaux sont vendus à des privés, comme les chèvres par exemple. Nous avons une règle entre nous: c’est à l’employé·e qui voit en premier le nouveau-né que revient la chance de choisir son nom.
7) Quels sont les animaux les plus difficiles à nourrir et à soigner ?Christelle : Au niveau du genre de nourriture particulière, je dirais les rennes, car ils ne mangent pas la même chose que les autres animaux, nous devons préparer des légumes râpés, des betteraves trempées, pas de foin, mais du regain. Le tétras est également une espèce compliquée à nourrir, car la composition est très variée et spécifique. Dans le vivarium, nous leur donnons des proies mortes que nous réchauffons. Généralement nous nettoyons les enclos sans les sortir. Les espèces venimeuses sont soignées par des personnes qui ont des autorisations et formations spéciales, tout le monde ne peut pas le faire.
8) Quelles sont les prochaines activités prévues à ne pas manquer ?
Nicolas :
Texte : Sophie Amey, Nicolas Margraf et Christelle Jaeggi /
Photos : Sophie Amey, Aline Henchoz, Suisse Tourisme – André Meier
naissances par année
animaux amenés à la station de soin, par mois