Le Tourbillon – Journal officiel mensuel de la Ville de La Chaux-de-Fonds
L’École s’engage pour développer le bien-être des enfants. Il arrive cependant qu’elle se prête à des situations de harcèlement : actes ou paroles répétés portant atteinte à l’intégrité d’un·e ou plusieurs élèves. Ces faits, intentionnels ou non, peuvent être physiques (intimidation, gifles, vols…) ou psychologiques (humiliations, surnoms, insultes, rumeurs, exclusion…), voire au travers des réseaux sociaux. On parle de harcèlement lorsqu’il y a répétition d’actions et disproportion des forces.
Aujourd’hui, une équipe enseignante est formée pour intervenir dans des cas d’intimidation. Elle intervient sans sanctionner afin de désamorcer une situation problématique en faisant appel à l’empathie et à la responsabilité de chaque élève. Le but est de retrouver au plus vite et pour chacun·e un climat serein au sein de l’école. Les interventions peuvent se faire sur une classe ou avec un groupe d’élèves. En cas de comportements nuisibles à répétition, adressez-vous au service socio-éducatif qui, selon la situation, fera appel au groupe bien-être à l’école (BEE).
Que met en place l’École en matière de prévention et de vivre ensemble?
Muriel Girardin, enseignante en 7e-8e :
”Cette semaine est une bonne semaine pour sourire”, lit-on sur l’affiche qui annonce la Semaine du Bien-Être à l’École. Cette semaine spéciale, dédiée au bien-être, est organisée depuis deux ans, et le sera dorénavant chaque année, dans le but de promouvoir un climat scolaire agréable. Un panel d’activités clef en main est proposé par un groupe de travail, et chaque enseignant·e est libre d’organiser une ou plusieurs leçons sur ce thème. Durant cette semaine, chaque élève participe au moins à une activité visant à construire une atmosphère positive. Ces activités peuvent être menées durant toute l’année, pour que le sujet reste à l’esprit des élèves. Car la sensibilisation est importante, et l’amélioration du climat scolaire considérée comme le meilleur moyen pour réduire le phénomène de harcèlement à l’école.
De quelle manière les réseaux sociaux exercent une pression permanente jusque dans la chambre des élèves?
Didier Clémence, conseiller socio-éducatif :
La majorité des cas de harcèlement sont intensifiés par l’utilisation des réseaux sociaux, ce qui élargit et complexifie les problématiques. L’anonymat, le partage et l’audience illimités permettent aux médias électroniques de devenir le parfait outil de dérapages. Nos élèves sont largement et très tôt équipés de téléphones portables. En tant qu’enseignant·e·s ou acteur·trice·s sociaux·ales en milieu scolaire, nous naviguons dans une zone grise entre le domaine privé et les répercussions que peut avoir le cyber harcèlement sur les élèves. Il est néanmoins très important de réagir et d’intervenir, de poursuivre la prévention et de collaborer un maximum avec les parents.
Le contrôle parental est essentiel pour permettre cet accompagnement éducatif, bien qu’il soit souvent difficile pour les adolescent·e·s d’accepter cette idée de surveillance dans cette période de construction de soi et d’autonomisation.
Comment peut-on accompagner la victime? Sophie Kernen, enseignante de soutien pédagogique :
“Il serait vraiment important que Juliette se sente mieux à l’école ; as-tu une idée pour que Juliette aille mieux, peux-tu faire quelque chose ?”. Partant du principe que Juliette est la cible de la situation, l’école va prendre soin de cette élève en mobilisant le groupe autour de cette question ouverte.
La victime, ou « la cible » est entendue par un·e intervenant·e auquel-à laquelle elle se confie et qui l’accompagne dans cette démarche. Dans le cas de notre école, il s’agit généralement des conseillers et conseillères du service socio-éducatif qui alertent, écoutent et travaillent avec « la cible » parallèlement à la démarche engagée avec les élèves du groupe, ceci avec la même intention : que la crainte et la violence se muent en climat de paix et de respect. En ce qui concerne la victime, le défi est aussi de l’outiller personnellement de manière durable afin d’éviter un engrenage de harcèlement répétitif, accentué par une posture basse et de repli.
Qu’est-ce que la préoccupation partagée? Thomas Saas, enseignant spécialisé et éducateur :
L’importance du groupe et du regard des autres est particulièrement élevée à la préadolescence. Un grand nombre de conflits prennent des proportions exacerbées par les nombreux élèves qui les observent sans y prendre part activement. Inconsciemment, leur présence et leurs diverses réactions (rires, encouragements, partages sur les réseaux…) contribuent parfois à transformer un simple incident en situation anxiogène et parfois inextricable. La préoccupation partagée part du principe suivant : chaque témoin d’une difficulté qui prend conscience de ses propres actes et de ses paroles de manière empathique réduit le risque qu’elle ne se change en situation dramatique (harcèlement, persécution, phobie scolaire…). Rendre à chaque élève la responsabilité de ses réactions et proposer une réflexion sur ses capacités à avoir un impact sur les souffrances de ses camarades permet souvent de sortir de la spirale négative générée par les effets de groupe.
Dossier constitué par Fabrice Demarle, directeur de secteur à l’École obligatoire
Photo : Muriel Girardin
L'Ecole obligatoire de La Chaux-de-Fonds :
• 4'450 élèves de 1re à 11e année
• 220 classes sur 27 sites
Le groupe d'intervention BEE:
• 18 enseignant·es pour rencontrer les auteurs
• 13 membres du service socio-éducatif pour accompagner les cibles